Cette fois, la pression européenne a fini par payer. Moins d’un mois après que la Commission européenne a menacé cinq voïvodies (régions) polonaises de les priver des fonds de la politique de cohésion, quatre d’entre elles ont fait marche arrière, en moins d’une semaine, sur les chartes homophobes qu’elles avaient adoptées. Ces déclarations de principe, sans aucune valeur légale, dénonçant « la promotion de l’idéologie LGBT » avaient été votées courant 2019 par de nombreuses collectivités locales polonaises, dans la foulée d’une vaste campagne homophobe orchestrée par le gouvernement national-conservateur du PiS (Droit et justice).
Le 3 septembre, les régions de Petite-Pologne, Lodz, Lublin, des Basses-Carpates et de Sainte-Croix, situées essentiellement dans le Sud-Est conservateur du pays, avaient reçu une notification de la Commission européenne leur demandant de prendre des « mesures correctives » face à des déclarations contraires à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (UE) et de l’article 2 du traité, relatif au respect des Droits de l’Homme et des minorités.
La première région à se plier aux exigences de l’exécutif européen a été celle de Sainte-Croix, le 22 septembre. Les conseillers régionaux ont adopté en lieu et place une déclaration sur « le respect de la tradition et de la culture séculaires de la Pologne ainsi que sur l’égalité et le traitement équitable », tout en se déclarant « oppos[és] à toute forme de discrimination fondée sur le sexe, l’âge, la race, le handicap, l’origine ethnique, la religion, les convictions ou l’orientation ».
« Changements cosmétiques »
« Ce vote n’est la victoire de personne, déclarait alors le président PiS du conseil régional, Andrzej Betkowski. Reste à savoir si la Commission approuvera notre nouvelle déclaration. Nous sommes d’accord avec certaines suggestions de Bruxelles, mais nous soulignons en même temps notre attachement à nos traditions et aux principes de notre Constitution. » Les débats dans les autres conseils ont souvent été houleux, de nombreux conseillers PiS refusant de se soumettre aux « diktats de Bruxelles » et à « l’avancée des théories du genre et néomarxistes ».
Mais dans les voïvodies de Lublin et des Basses-Carpates, les déclarations alternatives adoptées sont loin de satisfaire les associations de défense des droits des personnes LGBT, qui parlent de « changements cosmétiques ». La déclaration de Lublin supprime ainsi les formulations « idéologie LGBT » et « homo propagande », mais affirme s’opposer « aux actions dans la sphère publique qui (…) remettent en cause les valeurs protégées par la Constitution polonaise et interfèrent avec l’autonomie des communautés religieuses ». Les conseillers PiS admettent ouvertement qu’il s’agit de modifier la déclaration pour supprimer ce qui serait matière à une « mauvaise interprétation », tout en « gardant le sens et la consonance » du texte initial.
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