C’est sur un phénomène encore mal connu que devaient se pencher, mercredi 29 septembre, les députés de la commission des lois. Avant son passage en séance publique le 5 octobre, ils examinent une proposition de loi issue du groupe La République en marche (LRM) visant à interdire les « thérapies de conversion », ces pratiques qui prétendent « guérir » l’orientation sexuelle d’une personne, en voulant imposer l’hétérosexualité ou en encourageant l’abstinence.
Pour la députée (LRM) de l’Allier Laurence Vanceunebrock, à l’origine du texte, l’objectif est double : il s’agit à la fois de sanctionner ces pratiques, aux conséquences parfois dramatiques pour ceux qui les subissent, et d’obtenir des données plus précises sur leur ampleur. « Aujourd’hui, il est très compliqué pour les victimes de faire reconnaître leur préjudice, et c’est aussi très difficile d’avoir des chiffres, explique la parlementaire. A partir du moment où ce sera un délit spécifique inscrit dans le code pénal, dès qu’une victime ira déposer plainte pour cette raison, cela alimentera la statistique publique. » Elle se réjouit que le gouvernement ait engagé la procédure accélérée permettant l’adoption de la proposition d’ici à la fin du quinquennat, notamment grâce au soutien de la ministre déléguée à l’égalité femmes-hommes, Elisabeth Moreno.
« Des pratiques insidieuses »
Lors de la mission parlementaire « flash » menée à l’automne 2019 par Mme Vanceunebrock et Bastien Lachaud, député (La France insoumise, LFI) de Seine-Saint-Denis, les auditions ont permis de faire remonter « une centaine d’affaires ». « La mission s’alarme particulièrement de l’augmentation des signalements ces dernières années », peut-on lire dans son compte rendu. Trois catégories de thérapies de conversion – médicale, sociétale et religieuse – y apparaissent. « Ce sont des pratiques insidieuses ; souvent les gens ne se rendent pas compte de ce qu’ils ont vécu, d’autant que beaucoup y vont de leur plein gré parce qu’ils ne se sentent pas bien dans leur peau », remarque Lucile Jomat, la présidente de SOS-Homophobie.
Ces dernières années, des enquêtes journalistiques ont permis d’en savoir davantage sur ces « thérapies » pratiquées dans le cadre religieux. En France, les deux principaux milieux concernés sont les protestants évangéliques et les catholiques charismatiques, selon la mission parlementaire, qui a relevé certaines dérives au sein de la communauté de l’Emmanuel ou celle des Béatitudes. Mais « ces pratiques ne concernent pas les seules obédiences chrétiennes », précisent les députés, qui ont aussi eu connaissance de ces abus dans des communautés juive et musulmane.
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